Le salon du chiot : un business très craquant ?

Article publié dans ouest france le 12.09.2011
« 1 200 € pour un chiot ? ! ! J’ai toujours pensé qu’un chien ça ne s’achète pas. » Au parc-expo, au milieu des stands où des centaines de petites peluches couinent et jappent, Alain n’en revient pas. Il n’imaginait pas qu’« un petit cléb » puisse valoir autant d’or. « Au point que la plupart des vendeurs proposent des paiements en plusieurs fois. »

Un vrai business la vente de chiots ? « Non, c’est une passion, n’en démord pas Francis Marchal, un des 23 éleveurs du salon. Ceux qui font du business, ils mettent le chien dans les bras des gens. Moi, vous me verrez jamais faire ça. Et je regarde à deux fois avant d’en céder un. »

Francis Marchal, installé dans le Cher, est dans l’élevage depuis 20 ans. Il vend des Dogues de Bordeaux, Jack Russel, Staffie… Les prix ? De 750 € à 1 500 €. « Plus ils sont faciles à produire, moins c’est cher. J’ai des American Staffordshire terrier bleu (en fait, ils sont gris, mais on dit bleu). Seulement 2 % des chiens naissent de cette couleur-là. Alors ça vaut 1 500 €. » Sourire. « Ça vous paraît exagéré ? Moi pas. Les chiens, c’est comme les appareils photo : tout dépend du nombre de pixels et de la qualité technique… »

Il montre du doigt une touffe de poils à ses pieds. « Lui est à 750 €. C’est le coût de production avec 80 € de marge. J’ai cinq salariés. Rajoutez le véto, l’alimentation, les assurances, l’installation classée » À ce tarif, bien sûr, l’éleveur garantit des chiens « sans défaut, confirmables et propres à la reproduction ». Bref, pas de quoi aboyer.

« Un chien, puis deux, puis trois… »

Un peu plus loin, Brigitte Aviot, une autre éleveuse venue de Chartres, tient le même discours. Elle non plus ne veut pas être considérée comme une « marchande », mais comme une « éleveuse professionnelle ». La différence ? Là encore, « la passion. Ça n’empêche pas qu’il faut bien qu’on en vive. » Les chiffres, ça la connaît. Brigitte était comptable. Elle a commencé à faire de l’élevage « avec un chien, puis deux, puis trois… » Depuis, « il y a des périodes fastes et d’autres beaucoup moins ».

Comme tous les professionnels, elle gronde et montre les dents face à tous ces « faux amateurs » qui envahissent le marché et « vendent à bas prix » sur Internet. « Imaginez, je m’achète une machine à pain et je me mets à vendre des baguettes devant le boulanger ! »

Qu’elle se tranquillise. L’organisateur du salon, Bernard Moreau, tient les « braconniers » en laisse. « Cette semaine, on a eu 4 ou 5 coups de fil de faux professionnels. Alors on surveille le parking. Je ne peux pas accepter que certains vendent des chiens clandestinement dehors, alors que les autres payent leurs places à l’intérieur. » Soupir. « On est très contrôlés. Et ça coûte. »

« 1 000 €, c’est cher ! »

N’empêche, l’homme doit retomber sur ses pattes. Il avoue que sa boîte spécialisée dans l’événementiel, MB Synergies, n’organise « quasiment que du salon du chiot. Pourquoi ? Parce que contrairement à ce qu’on peut penser, la crise économique ne touche pas le chiot. Logique. Les gens sont plus chez eux, sortent moins et se réfugient sur des valeurs plaisirs comme l’animal domestique ou la déco. » Bernard Moreau va de ville en ville dans toute la France. À Quimper, il attendait environ 4 000 visiteurs sur deux jours. « Ça tourne bien, même si seulement environ 3 % des gens achètent un chien. »

On repart renifler l’ambiance dans le salon. Dans un coin, un homme est accroupi face à un adorable chiot. « Je me tâte pour le prendre. J’ai une maison, un terrain clôt, du temps La seule chose qui m’arrête, c’est le prix. 1 000 €, sans compter la litière et tous les gadgets qui vont avec c’est cher ! » Le museau dans ses mains, le cabot roule des yeux adorables et prend son air le plus craquant… pour le faire craquer. À croire que le vendeur lui a promis un os.

Yann-Armel HUET.

Le salon du chiot : un business très craquant ?